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5 février 2016 5 05 /02 /février /2016 09:27
Périples ferroviaires en Périgord

Vous aimez l’aventure ? voyagez en Aquitaine en train. Pour vous convaincre voici le récit des mes deux derniers voyages ferroviaires avec comme projet fou de rejoindre la capitale de notre beau pays en partant de Saint-Cyprien en Périgord qui ne dispose pas de gare, mais d’un arrêt, disons que c’est mieux que rien. Ça commence le 17 janvier. Après notre traditionnelle négociation avec Richard lorsque j’ai un train à prendre, j’obtiens d’être un quart d’heure en avance sur le quai de la petite gare fantome de St Cyprien. Grâce à cette angoisse qui me saisit à chaque RV avec un engin monté sur rails, je n’ai jamais raté un train. Ce sont les trains qui me ratent. On finit notre dispute au chaud dans notre petite voiture et nous avançons à l’heure dite sur le quai. Richard se plonge dans le panneau d’information et m’alerte « un mouvement de grève, le train précédent était assuré, pas celui de 9h35 » mais si je veux je peux attendre celui de 13 h et quelque, me précise-t-il gentiment.

Je téléphone aussitôt au numéro d’urgence aimablement mis à la disposition des voyageurs angoissés. Le jingle de la SNCF n’a jamais été aussi long et horripilant j’entends la machine dire de se voix sucrée « si vous voulez savoir quel est le prochain train qui partira de votre gare tapez le code de la gare en question ». Horripilant, ça se confirme. Il semble que le train prévu est toujours prévu ce qui va à l’encontre du panneau d’affichage, sans doute une grève est-elle un événement secondaire ? Mais aucun TER ne pointe son museau dans le brouillard du coté de Sarlat. Qui croire ? La panique. Je fais mentalement le compte de tous les RV urgents que j’ai pris à Paris dès le matin suivant, je râle sur les syndicalistes périgourdins qui ne pensent pas aux pauvres retraités qui soutiennent leur ligne menacée par la SNCF, en bref moi.Un rapide brain storming nous fait reprendre le chemin de la maison pour tenter d’arracher à Internet un changement de train à Libourne pour Paris vers 16h. À mi chemin de la gare je relis ma réservation initiale et je lis « départ de Libourne : 11h53 » Il est 9h45, on peut peut-être y arriver en voiture. Grimace de Richard qui fait demi-tour sans barguigner plus que cela. Rappel je prenais le train à ST Cyprien pour lui éviter le trajet aller-retour à Brive, un détail en passant. Bien sur la vallée de la Dordogne est envahie de nappes de brouillard et les panneaux « verglas fréquents » abondent avec l’image d’une voiture qui part en vrille.

Il nous faut 1 heure pour aller à Bergerac, aux confins de notre territoire. Richard est surement le seul conducteur qui respecte les limitations de vitesse dans tous les villages traversés et ils sont nombreux en Dordogne, les villages. Je le maudis mentalement mais ne dit mot, pensant que, comme on n’y voit goute, ce n’est pas le moment de la ramener. Je l’entends juste maugréer qu’il a raté le marché du dimanche matin. Bon il n’aura rien à manger pendant une semaine. Excellente occasion de liquider sa petite brioche naissante.

Juste avant d’arriver à Libourne, un train nous double sur la droite, on reconnait l’aérodynamisme des TER aquitaine, serait-ce mon train qui aurait eu un simple retard ? comment on dit gasp en occitan ? Impossible de savoir. On arrive à temps à la gare de Libourne, j’achète « le point » à 4 euros, la vendeuse se trompe en ma défaveur faut-il le préciser, en me rendant la monnaie avec un grand sourire. Pas grave j’ai décidé de tout passer par pertes et profits, expression qu’on utilise quand on perd sur tous les tableaux. Pas de place pour les profits. j’explique à Richard que c’est un jour sans, au moment où il met un euro dans une machine à café. Trop tard. Le liquide maronnasse est bien descendu, le sucre et la cuiller aussi, mais il n’y avait pas de gobelet pour recueillir l’ensemble. Sur le quai, le panneau donnant la composition du train s’arrete à 10 alors que je devais voyager dans la voiture 17. Un sms me parvient « changement de voiturage vous vous mettez où vous pouvez sans changer de classe ». Youpi je vais voyager debout pour couronner la journée.

C’est presque ce qui va se passer. J’installe mon matos ordi, cables, casque et commence à tapoter la liste de mes griefs. Mal m’en prend. Une dame montée à Angoulème (une ville maudite sur la ligne) me déloge avec véhémence. Elle refuse le siège resté libre à mes cotés pour réclamer la fenêtre avec comme argument :« je suis à mobilité réduite » je ne vois pas le rapport et change complètement de place. Là une personne encore plus violente me fait partir encore une fois en précisant qu’elle ne voudrait pas de moi même sur le siège à coté du sien. Charmant non ? J’ai la vague impression que les femmes ont un sens de leur territoire qui tient au sacré. Les hommes ont tendance à dire ok je me mets à coté et s’il faut je reprendrai ma place. Impossible d’épiloguer. Un controleur empoté me case sur une place « théoriquement elle devrait être libre » qui me rassure peu. Je me retrouve à l’autre bout du Wagon, je ne sais plus ou est mon manteau, ma casquette et ma valise. Je m’accroche à mon ordi pour tenir le coup. J’ai sauvé mes chaussures, c’est déjà ça.

Les gens qui ont un billet correspondant aux voitures qui roulent pavoisent : leur droit est absolu, ils ont payé tra la lère. Les pestiférés n’ont aucun droit. Pour ne pas aggraver l’éparpillement de mes affaires je reste dans la meme wagon et me rappelle ma devise préféree : no plain no complain, mais ça coince un peu, elle a du mal à passer. La vie m’a appris au moins cela quand on se plaint c’est plus grave juste après. Essayez vous verrez.

L’histoire ne s’arrete pas là J’ai remis ça 2 semaines plus tard. Quelle manie d’aller acheter ses ordonnances à Paris quand même ? Cette fois, pour changer, je tente le grand jeu des TER avec 2 changements à Périgueux puis à Limoges. Bien sur à Limoges (bon d’accord la gare est la plus belle de France mais l’heure n’est pas au tourisme) le train pour Paris est supprimé, ce qui fait que les statues de la gare perdent instantanément tous leurs fans potentiels. Accablée j’ose pourtant demander qui a eu l’idée de supprimer un train, MON train, à des cheminots avec SNCF marqué sur leurs gros biceps ? « Une débroussailleuse qui est tombé sur les rails, direct sur un caténaire ». Ah bon, dis-je et c’est grave ? apparemment pas pour eux. Bien sur elle a coupé le jus la débroussailleuse. Je demande avec une petite voix qui des fois a du succès que peut etre le train suivant vers 17 h... Alors là c’est la franche rigolade chez les travailleurs du rail « Vous pensez ! pas de jus ! yen a pour des heures » Ma parole ça les amuse. Les naufragés du train Limoges Paris se groupent sous le tableau des départs. Chacun cherche quelle solution adopter : aller dormir à Limoges chez une vieille tante, prendre un taxi, affréter un avion. Ça cogite dur en pianotant nerveusement chacun sur son téléphone portatif. D’un seul coup un mouvement de foule emmène ce petit monde vers un quai. Sans info je suis le mouvement. On nous recase dans un TER pour Poitiers d’où il est potentiellement possible de nous enfourner dans un TGV qui vient de Bordeaux et va à Paris sur une voie interdite aux débroussailleuses. Je ne sais pas où est Poitiers par rapport à Limoges, je me dis que j’ai échafaudé le trajet pour éviter d’atterir à Montparnasse. Encore raté. Entre naufragés on papote je dis à tout le monde que c’est ma faute que je suis maudite par les dieux du rail et qu’il suffit de prendre le même train que moi pour aller de galère en galère. Ils disent qu’ils feront attention la prochaine fois.

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